Puisque les Jeux Olympiques (JO) de Paris 2024 viennent de se terminer, je vous propose d’aborder la notion de pensée contrefactuelle que nous allons pouvoir illustrer avec les athlètes des JO.
Qu’est-ce que la pensée contrefactuelle ?
La pensée contrefactuelle qui pourrait se résumer par le fameux « et si… » ou « si seulement… » a été illustrée par Daniel Kahneman et Dale Miller (1986). Elle est définie comme une représentation mentale d’une éventualité par rapport à un événement passé. Elle illustre la tendance à imaginer comment les choses auraient pu être dans une situation passée. Par exemple : « Si seulement je n’étais pas parti(e) avec cinq minutes de retard ce matin, je ne serai pas monté(e) dans ce métro qui est tombé en panne ».
Cette pensée nous aide à mieux appréhender le monde dans lequel nous évoluons en nous permettant d’identifier, ou tout au moins en essayant d’identifier, les facteurs à l’origine de la situation vécue. Elle a un impact émotionnel significatif et un impact sur notre compréhension du monde. Le raisonnement contrefactuel est automatique et rapide, vous ne vous lancez pas de manière volontaire dans ce type de raisonnement.
Que viennent faire les athlètes des JO dans cet article portant sur la pensée contrefactuelle ?
Medvec, Madey et Gilovid (1995) ont publié un article intitulé « Quand moins est plus : pensée contrefactuelle et satisfaction parmi les médaillés olympiques ». Leur étude se base sur les réactions émotionnelles des médaillés olympiques au JO de Barcelone de 1992. Ces trois auteurs montrent que les réactions émotionnelles sont influencées par les pensées des athlètes sur ce qui aurait pu être c’est-à-dire le fameux « et si (seulement) … ».
Les différences dans les réactions émotionnelles concernent en particulier les médaillés d’argent et de bronze. Les médaillés de bronze ont tendance à se dire qu’ils auraient pu repartir bredouille en finissant quatrième tandis que les médaillés d’argent ont tendance à se dire qu’ils auraient pu gagner donc qu’ils auraient pu avoir la médaille d’or. Et cela fait toute la différence émotionnellement ! Là où les médaillés de bronze sont satisfaits de leur médaille, effectivement à la quatrième place ils n’auraient pas eu de médaille, les médaillés d’argent sont déçus de leur « échec ».
Nous parlons même de raisonnement contrefactuel à la hausse ou à la baisse. Un raisonnement à la hausse envisage comment la situation aurait pu être meilleure : « Si seulement j’avais gagné ce point, j’aurais gagné le match. ». Un raisonnement à la baisse envisage comment la situation aurait pu être pire : « Et si je n’avais pas gagné ce point, j’aurais sûrement perdu le match. ».
Les raisonnements contrefactuels à la baisse sont plus apaisants émotionnellement parlant car ils montrent que les pertes auraient pu être plus importantes, la situation plus négative. Les raisonnements contrefactuels à la hausse génèrent souvent des regrets et sont donc moins apaisants sur le plan émotionnel mais peuvent inciter à l’action : « Je vais m’entraîner plus pour être champion olympique dans quatre ans ! ».
La fonction de la pensée contrefactuelle est quoi qu’il en soit positive car dans un cas elle nous protège de la douleur liée au rejet et à l’échec, et dans l’autre, elle nous pousse à agir. Cependant, comme tous les modes de raisonnement, la pensée contrefactuelle doit nous être bénéfique et ne pas nous maintenir dans un immobilisme de « et si ».